Ouais, enfin un exutoire !
J'en profite donc pour embêter tout le monde en parlant de
Blame!, oeuvre à part s'il en est...
Pour bien faire comprendre la démarche de la chose, j'vais commencer par présenter rapidement l'auteur :
Tsutomu Nihei, un japonais qu'il est bien... C'était un type pas forcément prédestiné à devenir mangaka, puisqu'architecte de formation. Il a tout de même fini sur ce chemin, tout en restant très inspiré par les comics et la BD franco-belge... mais aussi des influences moins courantes du genre
H.R. Giger (un graphiste apparemment constamment sous acide, très connu pour avoir pondu le design d'
Alien. On aime ou pas. J'aime) ou
Enki Bilal (pareil, sauf que lui n'a pas bossé sur
Alien).
Bref, tout ça ressort très clairement dans ses productions, que ça soit
Blame! ou les autres : Des éléments d'architectures toujours très fouillés, formant un singulier mélange avec son style de dessin à la plume (qui poutre grave sa mère), allié à un découpage et une narration aussi efficaces qu'originaux, se prêtant autant aux scènes d'action que de contemplation (qui prennent à elles deux plus de 90% du camembert). Autre trait distinctif : les personnages sont très souvents inexpressifs, ce qui donne une interprêtation de leur personnalité beaucoup plus subtile que d'accoutumée... je souhaite bonne chance à qui souhaite les caser dans l'un des stéréotypes du genre. Seule l'action compte, en particulier lorsque tout est immobile (si si, ça fait du sens).
Hem, pour en revenir à
Blame! (j'vais tenter de limiter mon recours au charabia philosophique), il rentre totalement dans cette originalité et ce traitement si caractéristiques. A tel point qu'il est difficile de trop parler de l'histoire (pourtant extrêmement aboutie) sans gâcher le joli puzzle que l'on se constitue à la lecture des 11 volumes. En effet, le déroulement de l'histoire comprend, par exemple, vraiment très peu de dialogues (genre une cinquantaine de bulles pour le tome 1), et, surtout, aucune interaction directe avec le lecteur. Concrètement, aucun des personnages ne monologuera - comme au théatre - rien que pour faire comprendre à un hypothétique spectateur ce qui se passe (ou alors très subtilement). Ca parrait pas, mais ça tranche beaucoup avec les processus de scénarisation classiques : Les éléments de l'histoire sont la plupart du temps donnés bruts, sans prendre le lecteur pour un débile, et se dernier se forge du coup sa propre interprêtation des faits. Exemple : Aucun personnage ne dira "oh oh oh, tu es méchant, je vais te taper". Il va taper direct. Au lecteur de comprendre pourquoi.
Pour placer tout de même un peu les faits, ça se passe peut-être dans le futur, peut-être sur Terre... Ce qui est sûr, c'est que
Blame! fait voler en éclats tous les repères, que ça soit d'espace ou de temps.
BLAME!